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RCP2.6 versus GIEC:  Transition écologique…Transparente …  Vraiment ?

A propos du rapport du GIEC 2013 :

Le rapport du GIEC 2013 confirme pleinement les inquiétudes climatiques soulevées dans le rapport précédent de 2007. Les modèles informatiques utilisés ont largement progressé et parviennent à reproduire de grands acteurs climatiques comme les phénomènes des Moussons et El Niño-La Niña.

Ces simulations permettent de préciser la manière dont le réchauffement climatique – maintenant inéluctable- va affecter les différentes régions ; hausse du niveau des mers, acidification des océans, fonte des banquises et des glaciers, occurrence plus grande de phénomènes extrêmes : tempêtes, cyclones, sécheresses, inondations, modification des couverts végétaux et incidence sur l’agriculture.

Le rapport évoque pour le siècle suivant la possibilité de phénomènes d’ampleur encore plus grande si le réchauffement dépasse les quatre degrés à l’horizon 2100 : accélération de la fonte de la calotte glaciaire du Groenland, écroulement de la partie marine de la calotte glaciaire antarctique, affaiblissement de la circulation méridienne océanique de retournement de l’Atlantique (AMOC) avec un risque d’effondrement. L’AMOC désigne tout l’ensemble de circulations océaniques régissant les échanges de chaleur entre l’équateur et les pôles, dont le Gulf Stream, la circulation thermohaline et la plupart des grands courants chauds ou froids ; l’effondrement de l’AMOC entrainerait un bouleversement complet de l’équilibre climatique de la terre difficilement prévisible.

Les prévisions climatiques sont établies en fonction de quatre scénarios RCP (representative concentration pathways) détaillés d’évolution des émissions de gaz à effet de serre jusqu’en 2100. Ces quatre RCP contiennent un scénario d’atténuation conduisant à un niveau de forçage très bas (RCP2,6), deux scénarios de stabilisation (RCP4,5 et RCP6,0) et un scénario aux émissions de gaz à effet de serre très élevées (RCP8,5). En incluant également les concentrations prescrites de CH4 et de N2O, les concentrations en CO2 équivalent pour 2100 sont de 475ppm (RCP2,6), 630 ppm (RCP4,5), 800 ppm (RCP6,0) et 1 313 ppm (RCP8,5).

Le seul scénario limitant la hausse de température à 2°C à la fin du siècle (avec une probabilité supérieure à 0,67) est le RCP2.6 et si l’on veut éviter des catastrophes potentielles c’est celui là qui doit nous servir de modèle pour limiter nos émissions de Gaz à effet de serre (GES).

Or, contrairement aux rapports précédents, le rapport 2013 du GIEC ne précise que très peu le contenu de ces scénarios. Les quatre RCP sont en effet établis et publiés maintenant par d’autres acteurs scientifiques suivant un cahier des charges et des méthodes de simulation complexes prenant en compte les éléments géographiques, économiques et environnementaux. Le rapport du GIEC rend alors compte de leurs impacts climatiques.

Le contenu économique, sociétal, les hypothèses et choix inclus dans les différents RCP ne sont alors plus accessibles au citoyen.

J’ai donc recherché sur le web quel pouvait être ce RCP2.6.

On trouve à l’adresse suivante : http://link.springer.com/article/10.1007%2Fs10584-011-0152-3/fulltext.html une publication scientifique chez Springer intitulée :

“RCP2.6: exploring the possibility to keep global mean temperature increase below 2°C” Detlef P. van Vuuren.

Sans rentrer dans le détail technique on peut reproduire ici les quelques graphiques essentiels.

scenario énergie primaire

scenario énergie primaire

gaz à effet de serre, émission globale
gaz à effet de serre, émission globale

gaz à effet de serre, émission globale

scénario occupation des sols

scénario occupation des sols

évolution des flux carbone

évolution des flux carbone

coûts carbone  en$/tC et coût d'ajustement en %PIB

coûts carbone en$/tC et coût d'ajustement en %PIB

In RCP2.6, CO2 emissions from fossil fuel use are reduced by a combination of energy efficiency, increased use of renewables and nuclear power, use of carbon capture and storage and increased use of bioenergy.

Le scenario prévoit donc une augmentation des renouvelables et de l’efficacité énergétique mais aussi du nucléaire, du charbon, du gaz naturel et de l’agro-énergie avec l’utilisation de piégeage et stockage du CO2.Tous ces derniers éléments ne font pas forcément bon ménage avec nos préoccupations environnementales.

Le silence des organisations écologiques-si souvent arcboutées contre le nucléaire et les agro-carburants- à ce sujet est pour le moins surprenant car je doute fort qu’elles ignorent ces contenus.

Quelles évolutions pour nos futures émissions de GES ?

Le rapport du GIEC ainsi que le contenu du RCP2.6 nous permettent cependant de chiffrer les émissions de GES compatibles avec les 2°C de réchauffement.

Les prévisions pour la consommation énergétique mondiale sont nettement en hausse et utilisent massivement le nucléaire et le piégeage et séquestration carbone comme on peut le voir sur ce graphique où chaque carreau représente 50 exajoules EJ.

L'exajoule est une unité d'énergie 1EJ=10exp18J=277,8TWh (térawattheure 1Twh=10exp12wh= 1Gkwh).
répartition énergie

répartition énergie

Il y a donc un doublement de la consommation énergétique entre 2010 et 2100, de 550 à 1050EJ. Les consommations prévues en 2100 sont les suivantes:

Nucléaire :170 EJ Charbon avec CSS : 240

Renouvelables :150 Bio-énergie avec CSS : 120

Gaz avec CSS : 100 oil :25 gaz :100

Bio-énergie : 120 Total # 1050EJ # 292000 Twh

On est donc bien loin des scénarios de sobriété énergétique et on devine, qu'après la crise des subprimes de 2008 et la conférence de Copenhague de 2009, les impératifs économiques et les politiques de court terme ont remis la croissance au cœur du système.

Le rapport du GIEC nous donne cependant les limites des émissions de CO2 compatibles avec un réchauffement inférieur à 2°C

D'après le rapport du Giec 2013, un réchauffement limité à 2°c peut être atteint si les émissions cumulées 2012-2100 de CO2 (Provenant de l’utilisation de combustibles fossiles, de la production de ciment, de l’industrie et du secteur des déchets.) restent dans la tranche 140-410 GtC ou 510-1505GtCO2.


Par ailleurs, il nous indique qu'entre 1750 et 2011, les émissions de CO2 dues à l’utilisation de combustibles fossiles et à la production de ciment ont libéré 375 [345 à 405] GtC dans l’atmosphère et l’on estime que la déforestation et d’autres changements d’utilisation des sols ont relâché 180 [100 à 260] GtC. Cela se traduit par des émissions cumulées de 555 [470 à 640] GtC. (1 GtC=3,667 GtCo2)
• Parmi ces émissions anthropiques cumulées de CO2, 240 [230 à 250] GtC se sont accumulées dans l’atmosphère les autres étant absorbées par les puits naturels (sols, océans).


Il y a donc une dette de 240GtC soit 880 GtCo2 antérieures à 2011 dont les 2/3 seulement sont attribuables aux combustibles fossiles, soit 587Gtco2 et 1/3 aux changements d'utilisation des sols partagé par tous. L'émission potentielle cumulée de co2 jusqu’en 2100 ne doit pas dépasser 510 Gtco2 (hypothèse forte HF) ou 990Gtco2 (hypothése moyenne HM) ou 1505 Gtco2 (hypothèse faible Hf).


Les émissions cumulées 2012-2100 potentielles pour chaque pays doivent être calculées au prorata de la population. Le montant de la dette est plus difficile à calculer mais on pourrait imaginer un calcul basé sur la population et pondéré par la consommation moyenne sur les cinquante ou cent dernières années.

Comment calculer les dette pour chaque pays?

Il faut disposer de plusieurs sources d'information cohérentes et fiables sur les émissions cumulées avant 2010 au niveau mondial et par pays et par habitants (per capita). On peut trouver ces données per capita pour 1850-2008 sous forme de graphe à haute définition:

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/7c/Cumulative_energy-related_per_capita_carbon_dioxide_emissions_between_1850-2008_for_185_countries.png

On peut en extraire le tableau suivant en tco2/h

RCP2.6 versus GIEC:  Transition écologique…Transparente …  Vraiment ?
RCP2.6 versus GIEC:  Transition écologique…Transparente …  Vraiment ?

Pour calculer le cumul moyen mondial par habitant sur une longue période on a utilisé les données "Global co2 emissions from fossil fuel burning, cement manfacture and gas flaring 1751-2010" de Tom Boden et Bob Andres

sur le site :

http://cdiac.ornl.gov/ftp/ndp030/global.1751_2010.ems

(on trouve des statistiques intéressantes sur le site

http://cdiac.ornl.gov/trends/emis/tre_coun.html#W.)

On trouve alors que la moyenne mondiale de co2 cumulé par habitant depuis l'ère industrielle est de l'ordre de : 196 tco2 pour une émission cumulée mondiale de 1338Gtco2

Calculons alors différents scénarios d'évolution des émissions CO2 pour la France compatibles avec 2°C de hausse

Il nous faut calculer la quotepart d'émissions cumulées 2012-2100 au prorata de la population dans les trois hypothèses HF, HM, Hf pour une population mondiale de 7Md et une population française de 65M:

HF: total cumulée 510 France 4,7Gtco2

HM: total cumulé 990 France 9,2

Hf: total cumulé 1505 France 14

calcul de la dette

la moyenne mondiale cumulée 1850-2008 est de 196 tco2/h pour une émission cumulée mondiale de 1338Gtco2, celle de la France est : 515 soit un excédent total de

(515-196)*65=20,7Gtco2 pour 1338,si on ramène à la dette totale de 587 on trouve donc:

dette France : 9Gtco2

On trouve de même:

dette USA : 127Gtco2 pour HF:22,5; HM: 43; Hf:66,4

dette Allemagne : 28 Gtco2 pour HF:5,8; HM:11,3; Hf: 17,2

USA et Allemagne sont alors "insolvables" et devraient avoir des cumuls de Co2 négatifs.

On voit que pour la France, seule Hf nous laisse "solvables" avec un potentiel d'émission cumulée jusqu'en 2100 égal à: 5Gtco2

Calcul du taux éventuel de hausse ou de réduction t en % (par ex. 5%=5/100=0,05)

E:emission en 2011 pour la France: E=0,45Gtco2 ( en tenant compte des importations) Voir

http://www.transition-energetique.gouv.fr/sites/default/files/20.pdf

pour une réduction annuelle de t, les consommations 2012,2013,2014,...,2100 deviennent

E*(1-t), E*(1-t)exp2, E*(1-t)exp3,… E*(1-t)exp89. Le cumul est donc la somme des termes d'une suite géométrique, soit E*(1-t)*(1-(1-t)exp89 )/(1-(1-t))=E*(1-t)*(1-(1-t)exp89 )/t

ce cumul ne doit pas dépasser 5, on teste alors la formule sur excel ou une calculatrice programmable.

On doit alors avoir une réduction de 8,2% par an

Conclusion

On voit donc qu'il n'est guère possible d'envisager d'enlever effectivement la dette carbone des émissions compatibles ou de l'ajouter aux différents pays en fonction de leur moyenne d'émissions cumulées ;cela conduirait soit à des impossibilités techniques, soit à des négociations sans issue.

Tout au plus, peut-on envisager des compensations financières avec une discussion sur le prix de la tonne carbone et sur la part prise en compte. Car la responsabilité des pays émetteurs peut être doublement discutée : historiquement le phénomène du réchauffement climatique n'a été que tardivement mis en évidence et d'ailleurs il n'est pas encore reconnu par tous ; ensuite les plus gros émetteurs sont aussi ceux qui ont initié les progrés scientifiques et technologiques dont tout le monde profite ; de plus cette cette allocation en co2 proportionnelle à la population ne prend pas en compte la responsabilité démographique que l'espèce humaine devra bien un jour proche assumer.

L'Hypothèse HM est la seule qui apparaisse vraiment réalisable dans la société actuelle.

Pour la France;

cela nous donnerait un cumul possible de 9,2Gtco2 pour 2012-2100 ;

cela implique une réduction de 4.6% par an; chaque année la consommation est multipliée par (1-0,046)soit 0,954 ou divisée par 1/0,954.

La consommation 2011 de Co2 devra donc être divisée par 1/(0,954)exp19 en 2030 soit 2,5 et par 1/(0,954)exp39 en 2050 soit 6,3

La phrase extraite du rapport du GIEC 2005,"PIÉGEAGE ET STOCKAGE DU DIOXYDE DE CARBONE Résumé à l’intention des décideurs et Résumé technique" permet de mieux comprendre l'état de l'opinion par rapport aux mesures à prendre:

“La perception du public évoluera probablement, mais les recherches limitées menées jusqu’à présent montrent que deux conditions au moins doivent être remplies pour que le piégeage et le stockage du CO2 devienne une technologie crédible pour la population,
parallèlement à des options mieux connues : 1) l’évolution du climat de la planète imputable aux activités humaines doit être perçue comme un problème sérieux; 2) la nécessité de réduire notablement les émissions de CO2 afin d’atténuer les changements climatiques doit être reconnue.”

Cette perception du public évolue, mais elle n'est pas aussi générale qu'on veut bien le croire. Les récentes manifestations contre l’Écotaxe et ses portiques l'ont largement montré!

Si nous sommes convaincus de la nécessité d'agir il faut en priorité baisser le taux global de CO2 comme indiqué ci-dessus et abandonner des mesures de transferts d'émission qui rendraient les objectifs impossibles à réaliser ou en tout cas inacceptables par les populations.

Parvenir à un niveau d'émission commun pour tous les habitants de cette Terre me parait déjà être un bon objectif d'équité. Vouloir plus serait nous condamner à l'échec.

on peut trouver ici le fichier excel des cumuls de GES per capita pour l'ensemble des pays

on peut trouver ici le fichier excel sur les émissions mondiales annuelles de CO2 énergie-industrie depuis 1750

Tag(s) : #éco-transition
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